Au coin du feu dans le Château de Lauzun

*** Contribution extérieure***

Ici, nous allons voyager au cœur de la France, en Lot-et-Garonne, à la frontière avec la Dordogne. Au milieu de tous ces champs, se trouve le modeste château  de Lauzun dans la ville éponyme. Un bâtiment qui mise sur la discrétion et qui révèle toute sa beauté à l’intérieur de ses murs. En visitant la partie publique de la bâtisse, je suis tombée sur deux cheminées qui cachaient bien leur jeu. D’après les dire du guide, ces deux chefs d’œuvres d’architecture font partie des cinq plus belles cheminées de France. Quelle chance d’en avoir deux devant moi ! Avant de vous présenter mes deux trouvailles, laissez-moi vous conter l’histoire de ce château.

Pour les fins connaisseurs de Paris que vous êtes, vous avez sûrement fait le rapprochement entre le nom de ce château et l’hôtel particulier de Lauzun qui se trouve sur l’île de la cité. Eh bien, figurez-vous que c’est bel et bien la famille de Lauzun qui est à l’origine des deux bâtiments, malgré les 560 kilomètres qui les séparent. L’histoire du Comte de Lauzun, celui qui a fait la réputation du titre « de Lauzun », est riche en péripéties et nous renvoie à la cour du roi Louis XIV. De son vrai nom, Antonin Nompar de Caumont n’est pas devenu Comte du jour au lendemain. Bien décidé à se faire un nom à la cour du roi, il devient rapidement le favori du souverain et se fait nommer capitaine, puis colonel-lieutenant. En 1669, Le roi offre alors à Lauzun la possibilité de devenir grand maître de l’artillerie de France si et seulement s’il arrive à garder secrète cette promesse. Mais notre comte adore se targuer  et Louis XIV retire sa proposition.

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Antonin Nompar de Caumont

Mais Lauzun est persuadé que le roi a autre chose à lui reprocher et, sans gêne, il se glissera sous la couche du roi et de madame de Montespan pour tenter de découvrir les non-dits. Il apprend alors que la maîtresse du roi, pourtant son amie, ne le porte plus dans son cœur et veut sa perte. Lauzun ne se laissera pas faire pour autant et traitera dans les règles de l’art Madame de Montespan de « pute à chien ». Le roi, pas très très content, réprimande son ancien favori et, face à l’insolence de l’homme, l’envoie à la Bastille. De retour à la Cour quelques jours plus tard, il retrouve les faveurs du souverain et se fait demander en mariage par Mademoiselle de Montpensier, la Grande Mademoiselle, cousine du roi. Louis XIV accepte mais se ravisera trois jours plus tard pour des raisons restées floues. Lauzun se fait arrêter dans la foulée et cette fois-ci restera une dizaine d’années en prison. Il y fait la rencontre de Nicolas Fouquet avec qui il correspondra jusqu’à la fin de sa vie. En 1681, Melle de Montpensier, toujours folle amoureuse de son Comte, obtient sa libération en l’échange d’adopter un bâtard légitimé de Louis XIV. Ils se sépareront 3 ans plus tard et les désirs du comte de 62 ans se tourneront cette fois-ci vers Geneviève-Marie de Durfort, âgée de 15 ans. Il s’éteint très vieux pour l’époque, à 90 ans, sans descendance, le 19 novembre 1723.

L’histoire du château est quant à elle beaucoup moins riche que celui de son propriétaire. Construit en 1259 pour rendre hommage à Alphonse de Poitiers, frère du Roi Saint Louis, le château de Lauzun passe dans les mains de grandes familles. Il aurait d’ailleurs joué un rôle clés lors de la Guerre de 100 ans (1337-1453). En 1565, le roi Charles IX et Catherine de Médicis avec la cour se rendent au château, suivis dix ans plus tard par le roi Henri de Navarre. Autant dire que ce château a quand même son mot à dire dans l’Histoire de France. A la mort du comte de Lauzun qui s’était très peu rendu dans son château, Marie-Antoinette, sa nièce, héritera du château. Celui-ci sera revendu en 1807 puis en 1837 et connaîtra des vagues de restaurations donnant alors la bâtisse que nous connaissons aujourd’hui.

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Rien de tout cela nous ramène aux cheminées mais l’histoire a fait que ce château, bien modeste, abrite deux pièces d’architectures qui ont bien peu d’égales dans la France entière. Il est dit qu’elles sont l’œuvre de Pierre Souffron, architecte originaire du Périgord qui habitait alors la ville.

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La première, la plus imposante, préside l’immense salle des Gardes. Elle présente moins de détails que sa voisine mais se laisse quand même admirer facilement. Vase de 5,5 m de hauteur et de 4,25 m de large, elle est constituée de sveltes colonnes en marbre polychrome à chapiteaux ioniques. Les couleurs sont sobres et le marbre semble daté d’hier.  Sa simplicité contraste alors avec la cheminée dans la pièce voisine, la chambre du roi, qui se présente comme surchargée d’une centaine de petites sculptures. Le centre du bloc attire l’œil des visiteurs qui voient alors une multitude de petites statues semblant être animées sous leurs yeux. Le détail est surprenant et les quatre panneaux, qui représenteraient les quatre éléments, grouillent de personnages qui attisent encore aujourd’hui, la curiosité des historiens. Certaines sculptures posent des problèmes de par leur taille irréelle comme le lapin, bien plus gros que le cerf ou le cochon.  Des scènes empruntées à la mythologie se mélangent à des drakkars et des caravelles. Pour les amoureux de cette œuvre, le mystère reste entier et c’est alors à chacun de s’imaginer sa petite histoire !

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La deuxième cheminée dans la Chambre du Roi
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Petit Bonus : Si vous regardez bien, le toit de la partie centrale de la demeure ressemble étrangement à une coque de bateau retournée. En effet, il semblerait que le toit ait été construit par des marins et autres compagnons qui, nostalgiques de la mer, ont préféré une toiture leur rappelant leur voyage. Cette caractéristique se retrouve un peu partout dans la région.

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                                              Le fameux toit en coque de bateau

 

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